Diapason | N° 613 Mai 2013 | Patrick Szersnovicz | May 1, 2012
La deuxième école deVienne
«Ma musique n'est pas moderne, elle est mal jouée», disait Schönberg, conscient du manque de professionnalisme de certains de ses interprètes,Mehr lesen
«Ma musique n'est pas moderne, elle est mal jouée», disait Schönberg, conscient du manque de professionnalisme de certains de ses interprètes, pas forcément les moins enthousiastes. Réalisée (en studio ou live)depuis l'après-guerre jusqu'au début des années 1960 par la Radio de Berlin, la présente anthologie d'enregistrements inédits rassemble plusieurs artistes, principalement d'outre-Rhin, engagés à l'époque en faveur de Schönberg, Berg et Webern – il ne manque que Scherchen et Rosbaud –, certains étant aussi compositeurs (Krenek, Zillig, Maderna) ou même musicologue (Rufer).
La ferveur domine dans ces lectures d'attrait inégal mais souvent passionnantes, et toujours révélatrices des questions qui se sont d'abord posées pour bien jouer Schönberg et son école. Parfois l'interprétation n'est pas au niveau des intentions: malgré la compétence des chefs (Zillig, Fricsay), les musiciens du RIAS (Concerto pour piano, Symphonie de chambre op. 9) ou les Berliner Philharmoniker (extraits de la Suite pour cordes) ne semblent pas toujours comprendre leur role. Ailleurs, les problèmes d'assimilation instrumentale, technique, voire esthétique sont mieux résolus et ne compromettent en rien la direction puissante et romantique d'Arthur Rother dans la Passacaille de Webern ni celle, inventive, lumineuse, de Maderna dans ses Cinq pièces op. 10. Le Pierrot lunaire avec Josef Rufer à la baguette (1949) pèche par un manque de soin dans la sonorité, les instruments devenant d'une couleur agressive, alors que la récitante Irmen Burmester est remarquable.
Les solistes réunis ad hoc (Doberitz, Röhn, Troester) pour l'essentiel Trio à cordes op. 45, sommet de l'oeuvre de Schönberg, tout comme le Quatuor Vegh dans la Suite lyrique sont saisissants par leur modernisme anguleux, leur intensité dramatique et leur constante prise de risques, qui font oublier quelques imprécisions techniques et une texture d'ensemble peu équilibrée. Enfin, découvrir Suzanne Danco dans le grand recueil du Livre des jardins suspendus, Rudolf Kolisch ou Tibor Varga dans la Fantaisie op. 47, André Gertler et Diane Andersen dans les Pièces op. 7 de Webern ou Eduard Steuermann – qui a fasciné toute une génération de pianistes, à commencer par Alfred Brendel – dans les Klavierstücke op. 11, 19 et 23 vaut largement le détour.
«Ma musique n'est pas moderne, elle est mal jouée», disait Schönberg, conscient du manque de professionnalisme de certains de ses interprètes,